Nous déposons une motion de censure contre le gouvernement Bayrou
Le 16 janvier dernier, dans un courrier adressé aux parlementaires socialistes et apparentés, et suite à la demande de ces derniers, le Premier ministre s’était engagé à lancer une concertation sur les retraites « sans totem ni tabou, pas même l’âge légal d’ouverture des droits », avec comme condition « unique mais fondamentale… celle de l’équilibre financier ». Il avait conclu, qu’il y ait accord ou non à l’issue de la concertation, que le « Parlement aura, en tout état de cause, le dernier mot ». Ce courrier s’inscrivait dans le cadre de discussions menées par parlementaires socialistes et apparentés avec le Gouvernement pour ne pas le censurer, sur la base de mesures et d’engagements clairs, dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances (PLF) et du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2025.
Cette concertation a pris la forme d’une délégation paritaire permanente sur les retraites (« conclave »). À l’issue de ses travaux, les partenaires sociaux ont malheureusement constaté le 23 juin dernier l’impossibilité de dégager un accord sur les améliorations à apporter à la dernière réforme des retraites d’avril 2023, dite réforme “Borne”.
Cet échec du dialogue social est une mauvaise nouvelle, car cette négociation avait pour objectif de permettre à la démocratie sociale de réparer l’injustice sociale et la brutalité démocratique qu’a constitué l’adoption de la réforme des retraites. Cet échec est le résultat de l’intransigeance des organisations patronales, en particulier du MEDEF, qui n’ont pas fait preuve du même sens du compromis que les organisations syndicales.
Cet échec est aussi la conséquence d’une méthode qui a échoué et qui a rompu toute confiance pour la suite, alors que les députées et députés socialistes et apparentés sont sur le principe toujours prêts aux compromis dans cette Assemblée sans majorité. Cette méthode, c’est celle du Premier ministre François BAYROU, dont les différentes déclarations sont venues successivement contraindre les travaux du conclave et contredire sa propre parole.
Ainsi, le 16 mars dernier lors d’un entretien sur France Inter et France Info, le Premier ministre a écarté l’hypothèse d’un retour de l’âge légal de départ à la retraite à 62 ans, la jugeant « inévitablement coûteuse » et « peu réaliste » financièrement. Deux jours plus tard, alors que le conclave était encore en cours, François BAYROU a déclaré devant l’Assemblée nationale qu’un retour à 62 ans n’était « pas possible ».
Par ailleurs, le Premier ministre a fixé l’objectif d’un retour à l’équilibre financier d’ici 2030, soit un effort de 6,5 milliards d’euros, qui n’était initialement pas prévu. Si les députées et députés socialistes et apparentés souhaitent le retour à l’équilibre de notre système de retraites, il ne peut se faire que dans la justice et sans un calendrier qui entrave trop les marges de manœuvre des partenaires sociaux.
En conséquence, le 24 juin dernier, à l’occasion d’une question au Gouvernement qui lui était adressée, les députées et députés du groupe Socialistes et apparentés – par la voix de leur président Boris VALLAUD – ont à nouveau demandé au Premier ministre de tenir son engagement pris dans son courrier du 16 janvier 2025 et que son Gouvernement dépose, sans délai, un projet de loi ouvrant la voie à une réforme nouvelle et permettant au Parlement d’avoir le dernier mot et de débattre de tout, et en particulier de la mesure d’âge, c’est-à-dire la retraite à 62 ans.
Or, en réponse à cette question, le Premier ministre a définitivement fermé la porte à un projet de loi donnant le dernier mot au Parlement sur tous les aspects de la réforme de 2023, contrairement à ce même engagement. Ces propos constituent dès lors une trahison majeure de la parole initialement donnée.
Le respect cette parole étant au fondement de notre démocratie, c’est une nouvelle brutalité faite aux représentants de la Nation et à travers eux aux travailleuses et travailleurs qui sont les premières victimes de ce terrible impôt sur la vie qu’est le recul de l’âge de départ à la retraite à 64 ans.
Cette trahison n’est malheureusement que le dernier épisode d’une longue série de renoncements aux engagements pris dans le cadre de l’examen du budget de l’État pour 2025. Elle s’inscrit par ailleurs dans un contexte où le Gouvernement, au niveau européen, contribue fortement à la remise en cause du Pacte Vert et, au niveau national, avance sans cap en laissant son “socle commun” à l’Assemblée nationale détricoter tous les faibles acquis en matière de transition écologique des dernières années et céder à tous les fantasmes réactionnaires et xénophobes de l’extrême droite.
Pour toutes ces raisons, nous demandons la censure de ce Gouvernement.
